La fête des fleurs à La Torche … l’envers du décor

COMMUNIQUÉ DE PRESSE

24 mars 2024 (revenez, nous rajouterons bientôt des photos et vidéos)

Aujourd’hui 24 mars 2024, nous avons participé joyeusement à une manifestation qui est venue perturber la Fête des fleurs à La Torche. Un an après les atrocités de Sainte-Soline, nous n’oublions pas et poursuivons cet élan dans le Pays Bigouden. Deux jours après la journée mondiale de l’eau, nous rappelons combien les milieux et les êtres vivants, humains et non humains, souffrent des manques d’eau et des pollutions aquatiques.

Ici, comme chaque année, l’entreprise Kaandorp organise sa Fête des fleurs à la Torche (Plomeur), à l’occasion de la floraison des tulipes et jacinthes de plein champs. Mais derrière ces festivités, se cache la dure réalité de la production intensive de bulbes, dont les pratiques mettent en danger les milieux naturels alentour et la santé des personnes qui y vivent :

Prélèvement massif d’eau en toute illégalité. L’entreprise fait l’objet d’une mise en demeure par les autorités de régularisation du pompage dans l’étang de Saint Vio et d’une plainte pour non respect de la mise en demeure portée par Eaux et Rivières de Bretagne et Bretagne Vivante. Les volumes d’eau prélevés sont très importants (jusqu’à 145 000 m3 / an pour un volume moyen de 155 000 m3 dans cet étang et soit l’équivalent de la consommation annuelle de 3200 personnes, et de la méga-bassines de Priaires 79) et mettent en péril les zones humides aval, milieux protégés (RAMSAR et Natura 2000).

Contamination intolérable de l’eau par les pesticides, allant jusqu’à 12x les objectifs fixés par les le SAGE Ouest Cornouaille ) et avec 34 molécules détectées (analyse ruisseaux de la Torche 2019). Les habitant.es et les surfeur.ses ont déjà dénoncé ces excès dans des manifestations précédentes.

Accaparement du foncier de terrains pourtant publics (communaux) par les bulbiculteurs responsables de ces dégradations du milieu; empêchant, par la captation foncière, la conversion à des pratiques agricoles compatibles avec le milieu arrière dunaire à Tronoën.

Afin de dénoncer ces pratiques et réclamer leurs évolutions, à l’initiative de plusieurs collectifs, associations, syndicats et acteurs locaux, une manifestation perturbatrice s’est tenue le 24 mars 2024 à Kerloc’h et ses alentours, commune de Tréguennec. Nous n’acceptons plus la destruction de notre milieu et du vivant pour des intérêts privés et agro-industriels. Nous appelons les autorités à faire respecter la loi dans l’étang de Saint-Vio et à mettre fin au saccage de notre avenir commun.

Les médias en parlent

À Plomeur, des tensions à la Fête des fleurs sur fond de plaintes contre un producteur [Vidéo]

Finistère. Des manifestants écologistes font irruption à la fête des fleurs de la Torche

Pompage illégal à Plomeur : en pleine fête des fleurs, échanges musclés entre des horticulteurs et des manifestants


LES DÉTAILS DE CETTE AFFAIRE

L’illégalité formelle du prélèvement d’eau pour l’irrigation

Depuis des années, l’entreprise Kaandorp irrigue ses cultures en pompant illégalement de l’eau dans l’étang de St Vio, propriété du Conservatoire du littoral. Les volumes prélevés déclarés à l’Agence de l’eau vont jusqu’à 145.000m³ par an (voir Ressources), alors que l’étang fait un volume moyen annuel de 155.000m³. Ces prélèvements, représentant l’équivalent de la consommation annuelle de 3.200 personnes, ne profitent qu’à un seul agriculteur. Ils impactent fortement les zones humides aval (marais rétro-littoraux de Loc’h ar Stang) classées Natura 2000 et RAMSAR en provoquant leur assèchement. Le préfet du Finistère a mis en demeure l’entreprise Kaandorp le 3 mars 2023 de régulariser ce pompage avant le 31 mai 2023. Depuis cette dernière date, aucune démarche n’a été effectuée ni par l’entreprise ni par les services de l’État. Les associations Eau et Rivières de Bretagne et Bretagne Vivante ont porté un recours pour « non respect d’arrêté préfectoral et dégradation de zone humide ».

La contamination massive de l’eau par des pesticides :

L’analyse de 2019 effectuée par le SAGE (Schéma d’Aménagement et de Gestion des Eaux) Ouesco avait révélé des taux extrêmement importants dans le ruisseau de la Torche. 34 molécules, avec un cumul de concentration dépassant, pour certaines analyses, 12 fois les valeurs d’objectifs fixées par le SAGE ainsi que la présence de molécules interdites. De nombreux.ses habitant.es avaient déjà dénoncé ces contaminations de l’ensemble des masses d’eau, dont celles des eaux littorales de la Baie d’Audierne lors de précédentes manifestations.

Un accaparement du foncier par les bulbiculteurs locaux

Des arrangements directs de transfert de foncier public appartenant à la commune de St Jean Trolimon entre la société Dune, filiale d’Ernest Turc (ex Florimer) et l’entreprise Kaandorp ont été révélés lors du conseil municipal du 7 décembre dernier. Depuis, des acteurs locaux ont présenté la candidature alternative d’un éleveur bio en recherche de foncier, afin que les terres en question, situées dans le secteur arrière dunaire très fragile de Tronoën, restent en prairies. Depuis cette démarche, la société locataire Dune, n’a pas fait aboutir sa rupture de bail.


DOSSIER DE PRESSE – ANNEXES

Mise en péril des zones humides

L’irrigation des tulipes nuit-elle à la zone humide ?, Ouest France, 16 mars 2024

À Plomeur, des plaintes contre un producteur de fleurs qui pompe illégalement de l’eau, Le Télegramme, 21 mars 2024

Prélèvements en eau à Tréguennec: extrait BNPE

AnnéeVolume total (m3)
202176 918
202080 545
201970 273
201885 226
2017113 299
201683 124
2015 (Kaandorp délare pomper dans l’étang)145 941
201451 85

Source: https://bnpe.eaufrance.fr/acces-donnees/codeCommune/29292/annee/2021/usage/IRR

Extraits de l’étude de 2013 commandée par le Conservatoire du Littoral et intitulée « Étang de Saint Vio et Loc’h ar Stang, étude hydro-écologique Diagnostic et orientations de gestion »

« En aval, le Loc’h ar Stang est occupé par un marais dont la surface en eau libre se réduit. Le Loch’ ar Stang est confronté à l’atterrissement de sa roselière et à la fermeture des prairies humides »

« Les prélèvements effectués sur le bassin versant du Loc’h ar Stang sont importants, particulièrement sur l’Etang de Saint-Vio, où les prélèvements sont effectués d’une manière générale de mars/avril à octobre »

« Certaines années le pompage peut aller jusqu’à ‪145.000‬m³ alors que le « volume d’eau moyen de l’étang ‪155 000‬ m3. »

« Si on prend en compte le fait que ces prélèvements ont lieu essentiellement en période de fin de printemps / début d’été et que les débits d’apport du ruisseau sont directement liés à la pluviométrie, les pompages réalisés au mois de juin et juillet, lorsque le débit du ruisseau est de l’ordre de 10 à 12 l/s (soit environ 1000 m3 /j) peuvent représenter 100 % de l’alimentation de l’étang. »

« Les pompages réalisés dans l’étang de Saint-Vio présentent donc un impact considérable en période printanière et estivale et provoquent de fait une apparition précoce de l’étiage et de la coupure d’alimentation du Loc’h ar Stang situé en aval »

« la bulbiculture en particulier supporte mal les aléas climatiques caractéristiques du site de la baie d’Audierne : nappe phréatique perchée, inondations hivernales et sécheresses estivales : les cultures sont effectuées sur des terrains drainés en hiver, grâce à des fossés inter-planche et à un réseau de canaux périphériques. Elles sont irriguées au printemps et en été »

« La bulbiculture nécessite une mobilisation des ressources en eau durant la période printanière et estivale. En effet, les besoins hydriques sont très importants durant la phase de croissance du bulbe et les précipitations naturelles n’assurent pas la totalité de la demande. Les bulbiculteurs ont donc procédé à des ouvrages hydrauliques pour pallier ce manque d’eau : forages dans la nappe phréatique, pompage dans l’étang de Saint-Vio et des retenues d’eau »

« Les prélèvements en eau pour les cultures est sûrement l’un des impacts les plus significatifs de ce type d’activité agricole sur le milieu semi-aride de la baie d’Audierne. Les travaux hydrauliques (canaux, réserves d’eau, pompages et forages) et les exigences en eau de ces cultures (assèchements hivernaux et arrosages estivaux) pourraient contribuer à la modification générale du fonctionnement hydrique de la partie sud du site Natura 2000 baie d’Audierne. »

« Actions de gestion préconisées:

  • A court terme : modification de la convention autorisant le pompage dans l’étang afin de préserver le débit d’apport naturel
  • A moyen terme : arrêt du pompage dans l’étang.
  • ​Priorité : haute »

Contamination aux pesticides

En Bretagne, la culture de tulipes, jacinthes et iris entraîne une pollution majeure aux pesticides, Basta le 19 juillet 2022 par Nolwenn Weiler

Mise en demeure par le Préfet, en date du 3 mars 2023, de Kaandorp SARL de régulariser le pompage illégal

NOTE: cette régularisation n’est jamais arrivée

Transfert de bail verrouillé à Saint-Jean de Trolimon

« La société Dune (anciennement Florimer), a souhaité se séparer de 5 ha de terres agricoles louées à la commune de Saint jean Trolimon au lieu dit Vouden Lan et actuellement en jachère. Cette rupture de bail était conditionnée au fait que la société Kaandorp, producteur de bulbes récupère ce bail auprès de la commune. Un vote houleux au conseil municipal le 7 décembre dernier entérinait ce « transfert » de bail. »

À Saint-Jean-Trolimon, le transfert d’un bail rural au profit de Kaandorp secoue le conseil municipal, Le Télégramme, 7 décembre 2023

Communiqué de presse Eau et rivières de Bretagne, Bretagne vivante, Confédération paysanne, le 14 février 2024.

Suite à la parution d’un article dans Le Télégramme relatant ce futur transfert foncier, des représentants des associations Bretagne Vivante, Eau et rivières de Bretagne ainsi que le syndicat agricole Confédération paysanne ont souhaité réagir et rencontrer le maire Jean Edern Aubrée le 13 décembre.

« L’objectif lors de cette rencontre était tout d’abord de présenter les enjeux environnementaux très forts liés au foncier dans ce secteur : ces terres agricoles sont tout à fait particulières car situés en milieu arrière dunaire, sur des sols donc très sableux. Les transferts de pesticides utilisés sur toute culture sont très rapides et massifs, en témoignent d’ailleurs les très mauvaises analyses d’eau du ruisseau de la Torche réalisées en 2019 par Ouesco (consultables sur le site internet de celui-ci). Cela impacte au final également la qualité de l’eau du littoral. Nous avons également des enjeux quantitatifs très forts concernant l’eau : depuis plusieurs années, l’EARL Kaandorp pompe en effet sans autorisation de l’eau dans l’étang de St Vio pour l’irrigation, et ce, même malgré la mise en demeure de l’administration qui s’achevait en mai 2023. Les volumes sont énormes, jusqu’à ‪145 000‬m3 par an certaines années, mettant en danger la biodiversité de cet étang et le fonctionnement de la zone humide en aval. Nous craignons que des cultures supplémentaires dans ce secteur accentuent davantage les prélèvements d’eau dans cet étang. Des plaintes ont d’ailleurs été déposées à ce sujet par nos associations. Enfin, nous avons une biodiversité sur ce secteur spécifique au milieu dunaire (les parcelles en question sont d’ailleurs enclavées dans une zone classée Natura 2000). Elle est fragile et nous devons la protéger. Nous avons donc tous voulu rappeler ces enjeux aux élus et leur rôle possible dans le choix des pratiques agricoles menées sur leur propre foncier pour défendre tous ces enjeux d’intérêt général. Nous ne sommes pas venus uniquement en opposition à la précédente décision du conseil mais en proposant une alternative. Le choix d’un nouveau locataire pour du foncier agricole appartenant à une collectivité ne peut se faire par des « arrangements » privés. La commune se doit au moins d’étudier d’autres candidatures. C’est pourquoi nous avons été accompagnés de Yoann Antoine de l’entreprise « Pâtures oubliées » lors de cet échange. Eleveur bovin et ovin en races bretonnes, en système herbager et certifié en agriculture biologique, il est en effet à la recherche de pâtures pour conforter sa ferme avec sa compagne. Il a donc logiquement déposé un courrier de candidature à la mairie. Nous avons bien sûr informé le gérant de l’entreprise Dune de notre démarche en amont de cette rencontre, mais depuis il n’a pas effectué sa rupture de bail, comme prévu. Les valeurs de cette entreprise ne semblent pas réellement en accord avec les orientations de sa société mère Anjou Loire production qui a par exemple intégré dans ses filiales la Ferme de Sainte Marthe, productrice de semences biologiques ou qui développe des gammes de bulbes bio via sa filiale Ernest Turc. Nous espérons que la commune pourra bientôt étudier ces 2 candidatures (ou plus) et restons également tous en veille sur notre territoire. »

Autres Ressources sur le fond

  • INF’EAU Suivi pesticides 2019: Dossier PDF
  • Etat des lieux de la qualité hydromorphologique des cours d’eau du bassin versant du Loc’h ar Stang : le Stang, le St Vio et le Gorre – SAGE Ouest Cornouaille 2015 : Dossier PDF
  • RAMSAR est un label reconnaissant l’importance mondiale des zones humides
  • Natura 2000 est un classement européen visant à protéger les habitats et les espèces

Autres ressources sur la mobilisation

Sainte Soline, 1 an après… Méga-boums ! sur le site de Bassines Non Merci!

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